Faire son chemin sur les scènes du monde, guitare à la main

La guitare classique s’est emparée du destin du jeune homme à l’âge de 12 ans. L’instrument a rapidement pris le dessus sur les autres auxquels il était familier. Il fréquentait alors le pensionnat de l’école primaire des Arbrisseaux à Compton. «J’ai aperçu une guitare classique sur l’un des lits et je suis tout de suite allé voir mon père pour savoir ce que c’était. Ça avait vraiment piqué ma curiosité», se rappelle-t-il. «Dès le début, j’ai aimé la sonorité de l’instrument.»

Quelques professeurs veilleront à polir le talent du jeune artiste, dont l’éclosion repose également sur un travail d’autodidacte. Claude Prud’homme, de Waterloo, l’accompagnera pendant trois ans. Son cheminement se poursuivra avec Álvaro Pierri, guitariste d’origine uruguayenne qui enseigne à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) depuis une dizaine d’années. C’est d’ailleurs au sein de l’institution d’enseignement montréalaise qu’il complétera un baccalauréat en interprétation guitare classique, sujet qu’il a approfondi grâce à une maîtrise à l’Université Laval.     

Bien qu’il ait déjà touché à la guitare pop ou électrique, il a grandi dans un milieu musical à la facture plus classique. Une mère pianiste, qui l’accompagne parfois sur scène, et un père saxophoniste, arrangeur et compositeur, auront forgé l’identité musicale du jeune Thierry. Les deux parents tiennent une école de musique à la maison. «Si ce n’était pas eux que j’entendais jouer, c’était des élèves», rappelle-t-il. Il remporta un premier concours à Drummondville, au tournant des années 2000. Au printemps dernier, il a été primé au concours international de guitare classique «Nicholas Alfonso», qui se déroulait à Bruxelles. Ces distinctions lui permettent de bien garnir son passeport et d’être en mesure de s’exprimer dans plusieurs langues.

Un cheminement classique… et sinueux

Malgré ces récoltes sur les scènes nationales et internationales, Thierry Bégin-Lamontagne possède un parcours qui n’est pas dépourvu d’embûches. Il est atteint du syndrome Gilles de la Tourette (SGT), un sujet qu’il aborde tout de même avec une certaine candeur en entrevue. Cette maladie neuromotrice est caractérisée par des tics qui affectent le langage ou les mouvements. Le défi est d’autant plus imposant que le moindre spasme pourrait déstabiliser sa concentration et ses élans sur scène, où il s’installe avec sobriété. Or, son cheminement lui a permis de maîtriser, d’une certaine façon, cette facette. «Sur scène, ça ne m’atteint pas, je suis dans mon corridor», illustre-t-il. Au fil des pièces qu’il interprète, le manche de la guitare est soumis aux mouvements frénétiques des doigts du virtuose, et les notes fusent à mesure qu’il pince les six cordes.

«Les possibilités de couleur et d’émotions qu’offre la guitare classique sont pour moi inégalées par rapport aux autres instruments. C’est très intime comme son, la projection y est plus subtile.»
Thierry Bégin-Lamontagne

La guitare classique, de l’aveu même du principal intéressé, l’a d’ailleurs ramenée à plusieurs reprises dans le droit chemin —à l’adolescence notamment—, une époque où il avait de la difficulté à accepter le fait d’être atteint de ce syndrome et où les tics se faisaient omniprésents. Telle une bouée qui lui a permis de regagner la rive alors qu’il nageait en eaux troubles, l’instrument s’est parfois avéré être son plus précieux allié, de par la discipline qu’il impose à celui qui se l’approprie. «Ça m’a sauvé la vie à plusieurs reprises pendant mon enfance. Cette échappatoire me permet de relaxer et de réfléchir. Pour moi, la musique, c’est une langue sans paroles».

Passage obligé

Avant de briller sous les projecteurs, le jeune virtuose doit enfiler de nombreuses heures d’exercices, souvent cloîtré dans une petite pièce, à peaufiner sa technique. Cet isolement peut lui sembler parfois lourd à porter, si bien qu’il opte pour le plein air en s’installant dans un parc. Les milliers d’heures de pratique constituent toutefois un tribut qu’il est prêt à payer pour récolter les éloges.

Maître chez lui

À peine rentré d’une tournée d’une douzaine de concerts au Brésil, Thierry Bégin-Lamontagne a pu étaler tout son talent dans le cadre d’un concert tenu à l’église Emmanuel, qui a fait salle comble. Il refaisait ses valises pour le continent sud-américain quelques jours après s’être entretenu avec JournalLeGuide.com, où une série de spectacles en Argentine l’attendaient.

Le jeune homme, s’il se réjouit de faire rayonner ainsi son génie, ne se berce pas d’illusions quant au fait de s’installer au Québec en vivant de son talent. La guitare classique demeure un art méconnu du grand public. «Il faut constamment se battre pour se faire entendre, pour se faire connaître et pour mettre en valeur la guitare», témoigne-t-il. Il examine la possibilité de s’établir, temporairement précise-t-il, en Europe pour avoir accès plus facilement aux divers concours qui sont légion là-bas. «En ce moment, ma priorité, c’est d’en faire le plus possible. Une simple participation permet de me faire entendre et d’obtenir des commentaires constructifs». Ces multiples allers-retours ne lui feront toutefois pas oublier ses origines, lui qui sera de retour à Cowansville pour un concert le 7 février prochain à l’église Ste-Rose-de-Lima.

Un passeport bien rempli 

Thierry Bégin-Lamontagne a donné des concerts en Espagne, en France, en Allemagne, en Italie, au Brésil, au Mexique, aux États-Unis et en Argentine.

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