Paco de Lucia, astre de la guitare flamenco

On disait de lui qu’il était le Jimi Hendrix du flamenco. Paco de Lucía est décédé au Mexique, à l’âge de 66 ans, selon une annonce de la mairie d’Algésiras, en Andalousie. C’est là que «la plus grande figure qu’ait connue le monde de la guitare», selon José Ignacio Landaluce, était né le 21 décembre 1947, sous le nom de Francisco Sánchez Gómez.

La ville du sud de l’Espagne a décrété un deuil de trois jours. Le guitariste avait choisi son pseudonyme en hommage à sa mère, Lucía, mais c’est à son père qu’il devait sa carrière de musicien. Né dans un foyer pauvre, le jeune garçon avait pris goût à la musique lors des longues jam-sessions pendant lesquelles ce dernier, guitariste lui-même, jouait avec les musiciens du quartier. Bientôt, il fut encouragé à passer, lui-même, douze heures par jour sur son instrument, développant un talent qui allait bientôt faire de lui le plus grand ambassadeur mondial de la guitare flamenco. Ce payo (non-Gitan) définissait le genre comme un mélange de cultures arabe, juive et gitane mûri dans les rues d’Andalousie. Et même si Algésiras n’était pas une ville aussi importante que Jerez ou Séville en termes de rayonnement musical, il y avait bénéficié d’un environnement propice à son éclosion.

Abandonnant l’école très tôt pour contribuer aux frais du foyer, il fit sa première tournée internationale à l’âge de 12 ans. Avec son frère aîné, Pepe, chanteur, il accompagnait alors la troupe du danseur José Groco. Un rôle qui lui aurait convenu à merveille si son père n’avait pas insisté pour faire de lui un guitariste soliste. Chanteur contrarié, il avait adopté la six cordes par timidité. Il la fit chanter pendant plus de cinquante ans sur les scènes du monde entier. Ses lignes mélodiques stupéfiantes de vélocité alternaient avec des phases de jeu plus introverti.

Une passion intacte

Après dix premières années placées sous le signe exclusif du flamenco, le musicien s’était ouvert à d’autres musiques. Son jeu avait alors incorporé des éléments de jazz et de musique brésilienne. De musique classique espagnole aussi, notamment les répertoires des compositeurs Isaac Albéniz et Manuel de Falla. Sa collaboration avec le chanteur el Camarón de la Isla, de trois ans son cadet, a fourni neuf albums clés du renouveau du flamenco dans les années 1970. À l’aube de la décennie suivante, il assemblait le Guitar Trio avec deux autres virtuoses: l’Anglais John McLaughlin et l’Américain Al Di Meola.

Enregistré en concert, leur album Friday Night in San Francisco est devenu un des disques les plus influents de son époque. S’il avait soif de collaborations avec des musiciens issus d’horizons très variés, il n’avait jamais perdu sa profonde identité de guitariste flamenco. Après quelques années d’exil au Yucatán (Mexique), où il pratiquait la pêche sous-marine, de Lucía s’était tenu éloigné des scènes pendant trois ans. Cet homme à la forte personnalité enregistrait des disques lorsqu’il avait quelque chose à exprimer uniquement. Il se produisait encore en Europe l’été dernier, éblouissant le public de sa passion intacte.

Très reconnu, il avait été fait docteur honoris causa de la Berklee College of Music de Boston et avait reçu le prix prince des Asturies pour les arts, la plus haute récompense espagnole.

VIDÉO – Écoutez Entre dos aguas, l’un des plus grand succès de Paco de Lucía.

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