Thibault Cauvin: le monde, guitare en mains

Bordeaux (AFP) – A presque 30 ans, couronné de multiples prix internationaux, le guitariste soliste classique Thibault Cauvin, né à Bordeaux, parcourt le monde, guitare en mains, ouvert à tous les publics et à toutes les expériences musicales.

Enfant, Thibault Cauvin, né en 1984, pensait que tout le monde apprenait la guitare comme on “apprend à marcher”. Il n’a que cinq ans lorsqu’il commence l’apprentissage de l’instrument avec son père, Philippe Cauvin, guitariste et compositeur à la croisée du classique, du contemporain, du jazz et du rock.

Très vite, le petit marcheur se fait marathonien des cordes. A 13 ans, il entre au Conservatoire de Bordeaux, puis intègre celui de Paris, où il suit la classe d’Olivier Chassain, successeur en 1994 d’Alexandre Lagoya (1929-1999). “Une formation très complémentaire”, se félicite-t-il, entre un “rapport très intellectuel à la musique” et une relation “plus charnelle, émotionnelle” léguée par son père.

Commence ensuite l’incontournable circuit des concours internationaux: “Nous partions avec mon père dans sa Volvo car il déteste l’avion et je répétais à l’arrière sur les routes”, se souvient l’artiste, yeux noisette et large sourire. Résultat: treize premiers prix internationaux avant l’âge de 20 ans, un palmarès encore inégalé. “Il avait une candeur qui lui valait tous les suffrages”, se souvient Olivier Chassain.

De coureur de fond, le jeune virtuose se mue alors en inlassable voyageur. “A 20 ans, je me suis lancé dans une tournée sans fin qui dure encore aujourd’hui”: plus d’un millier de concerts dans quelque 120 pays, de la Chine au Guatemala, de l’Autriche au Mozambique. En témoigne, son étui à guitare couvert de dizaines d’autocollants de sécurité aéroportuaire.

Mais si cette longue liste révèle une “véritable passion des voyages” remontant à sa lecture des albums de Tintin, elle démontre surtout son incroyable faculté d’adaptation: du Carnegie Hall de New York à un festival en plein air devant des milliers de personnes au Nigeria, de l’Opéra de Shanghai à un récital intimiste en Californie, de la Salle Tchaïkovski à Moscou à un Institut français au Cap Vert…

– Un instrument jeune –

“Tout jeune, Thibault disait qu’il ne voulait pas être guitariste, mais concertiste! Il est transcendé par le concert, c’est un bonheur pur pour lui d’être là et de jouer”, raconte Jean-Luc Joie, luthier bordelais, qui a accompagé l’artiste dans ses jeunes années. Les deux hommes se sont retrouvés il y a quatre ans lorsque le luthier a mis au point une “guitare amplifiée” qui a emballé le musicien, lui permettant de conjurer le manque de puissance sonore de l’instrument, tout en étoffant “la dynamique, la puissance et les couleurs”.

“La guitare classique a cent ans à peine, c’est un instrument en pleine évolution, ouvert sur le monde et à tous les styles. C’est notre rôle d’expérimenter, de repousser ses limites”, estime Thibault Cauvin, qui n’hésite pas à utiliser l’image et les réseaux sociaux pour faire découvrir son travail.

“Il est fonceur et possède une forme de certitude intérieure” qui lui vaut parfois “des regards étranges” dans le milieu de la guitare classique, analyse Jean-Luc Joie. “Il ne joue que des choses qu’il ressent profondément, en identité avec lui”, avec un “jeu paroxystique, souvent présent chez les violonistes, mais moins fréquent chez les guitaristes”.

Reflet de cette démarche, son cinquième disque “Cities” (2012), qui vient de ressortir en vinyle, voyage musical dans les villes du monde qui l’ont marqué, avec des compositeurs de tous les continents et de toutes les générations: Astor Piazzola pour Buenos Aires, Paco de Lucia pour Grenade, Nikita Koshkin pour Moscou ou son père pour … Bordeaux.

En 2013, pour fêter ses dix ans de carrière, le jeune musicien a décidé de “revenir aux sources” avec un album intitulé “Danse avec Scarlatti” (Sony Music), transcription de sonates pour clavecin du compositeur italien (1685-1757). Salué par la critique et classé trois mois parmi les dix meilleures ventes de classique à sa sortie, le disque offre une interprétation énergique, presque “dansante”, des sonates baroques.

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