Paco de Lucia, légende du flamenco, est décédé au Mexique

Cancun (Mexique) (AFP) – Le guitariste espagnol Paco de Lucia, légende du flamenco, est décédé au Mexique à 66 ans, laissant le souvenir d’un génie virtuose qui a renouvelé ce genre traditionnel, parcourant aussi le répertoire du jazz, de la musique classique et de multiples horizons musicaux.

“Hier soir nous a quittés le père, le frère, l’oncle, l’ami, et nous a quittés le génie de Paco de Lucia”, a annoncé la famille du guitariste dans un communiqué, ajoutant: “Il a vécu comme il a voulu et il est mort en jouant avec ses enfants au bord de la mer” au Mexique.

Paco de Lucia a succombé à une crise cardiaque, selon la mairie d’Algésiras, sa ville natale dans le sud de l’Espagne, qui rendait hommage à “la plus grande figure qu’ait connu le monde de la guitare”.

Son agent Jose Emilio Navarro a confirmé à l’AFP son décès d’une attaque cardiaque survenue alors qu’il jouait au footbal avec son fils de huit ans sur une plage de Xcaret, près de la station balnéaire caribéenne de Playa del Carmen, dans l’est-du Mexique, où il avait une maison.

Il résidait à Cuba mais était parti passer des vacances au Mexique avec son épouse et ses deux enfants, a ajouté M. Navarro. Son corps doit être rapatrié en Espagne mercredi ou jeudi, ont précisé son agent et un diplomate espagnol.

“La mort de Paco de Lucia transforme le génie en légende. Son héritage restera pour toujours, de même que la tendresse qu’il a toujours éprouvée pour sa terre”, a déclaré le maire d’Algésiras, José Ignacio Landaluce, alors que la ville andalouse, drapeaux en berne, a décrété un deuil de trois jours.

Paco de Lucia, de son vrai nom Francisco Sanchez Gomez, était né le 21 décembre 1947 dans cette ville de la région de Cadix, avant de devenir un guitariste de renommée universelle.

En 2004, il avait reçu le prix Prince des Asturies des Arts. Paco de Lucia, soulignait le jury, “a dépassé les frontières et les styles pour devenir un musicien de dimension universelle. A partir de la guitare flamenco, il a aussi exploré le répertoire classique espagnol, d’Isaac Albeniz à Manuel de Falla, l’émotion de la bossa nova et du jazz”.

“Paco était et restera un artiste universel, qui a porté l’âme de la guitare et du flamenco jusqu’au coeur du monde entier”, témoignait mercredi José Luis Acosta, le président de la société des auteurs et éditeurs espagnols (SGAE).

Malgré la célébrité, le guitariste était toujours resté discret, habitué à monter sur scène dans une tenue d’une grande sobriété, en pantalon noir et chemise blanche.

– Fidèle au flamenco –

Paco de Lucia aimait à rappeler qu’il devait sa carrière à son père, chanteur flamenco méconnu.

“Les gitans sont meilleurs parce qu’ils écoutent de la musique depuis leur naissance. Si je n’étais pas né dans la maison de mon père, je ne serais personne aujourd’hui. Je ne crois pas au génie spontané. Mon père m’a obligé à jouer de la guitare quand j’étais petit”, affirmait-il dans son livre “Paco de Lucia. A new tradition for the flamenco guitar”.

La légende veut que son père attachait une de ses jambes à un lit pour l’empêcher de sortir et le forçait ainsi à s’entraîner. “Ce n’était pas comme ça, c’était plus psychologique”, démentait Paco de Lucia. “Il me demandait +Pendant combien de temps as-tu travaillé?+. Je lui répondais +10 ou 12 heures+ et je voyais le bonheur dans son regard”.

Dès l’âge de 12 ans, le jeune prodige évolue sur les planches de salles flamenco, les “tablaos”, jouant la nuit et rapportant de l’argent à la maison. A quinze ans, il collabore déjà à des enregistrements de disques à Madrid. A 18 ans, il signe son premier album.

C’est à cette époque qu’il rencontre un autre jeune surdoué, Camaron de la Isla, qui deviendra la grande voix du flamenco moderne. Tous deux collaboreront jusqu’à la mort, en 1992, de Camaron, et signeront ensemble une dizaine de disques entre 1969 et 1979.

Parallèlement, Paco de Lucia renouvelle les interprétations du répertoire classique espagnol, enregistrant le Concerto d’Aranjuez de Joaquin Rodrigo, ainsi que des oeuvres de Manuel de Falla et Isaac Albeniz.

Il jouera aux côtés des plus grands du jazz: dans les années 1980, il s’associe à John McLaughlin et Al di Meola pour enregistrer un disque mythique, “Friday night in San Francisco”.

Mais il restera fidèle au flamenco: “Quoique je fasse, mon son sera toujours flamenco. Ce qui me donne la force et motive mon jeu, c’est précisément le fait que je suis un joueur de flamenco”.

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