Rory Gallagher, le roi irlandais de la guitare blues

Rory Gallagher disparaissait il y a bientôt vingt ans, à l’âge de 47 ans. À cause de sa consommation effrénée d’alcool, il n’était plus que l’ombre de lui-même. Quelques semaines après avoir subi une greffe du foie, il était emporté des suites d’une pneumonie, dans un hôpital londonien. Le natif de Ballyshannon, en Irlande, aura voué toute sa vie à sa passion pour la musique. Il ne s’est jamais marié, n’a jamais eu d’enfant.

Passant sa jeunesse à Cork, dans le sud de l’île, il apprend la guitare à l’âge de 8 ans avant de commencer à se produire sur scène à 10 ans, deux ans avant de gagner un concours de jeunes talents, à 12 ans donc. Rory Gallagher abandonne vite l’école pour devenir musicien professionnel à 15 ans. Après avoir fait ses débuts au sein d’un groupe de bal, le jeune fondu de blues électrique forme à 17 ans le trio Taste qui signera trois albums studio entre 1967 et 70, en plus de nous laisser deux live (à Montreux et à l’île de Wight).

Taste décroche un réel succès un peu partout en Europe et sa prestation très remarquée, avec Yes, au légendaire concert d’adieu de Cream, en novembre 1968 au Royal Albert Hall, ressemble pour beaucoup à une passation de pouvoir. Eric Clapton dira plus tard de lui : « 
L’homme qui m’a ramené au blues. 
»

Le plus grand guitariste du monde

En 1970, le groupe se sépare mais Rory continue sa glorieuse aventure en trio sous son nom. Et toujours avec cette énergie brute qui séduira aussi bien les publics rock et blues que les stars comme Jimi Hendrix à qui un journaliste demandait ce que ça faisait d’être le plus grand guitariste du monde. Réponse du Voodoo Chile : « 
J’en sais rien, demandez à Rory Gallagher
 ». Jimmy Page, Slash et The Edge de U2 ne tariront pas d’éloges pour celui qui, entre Van Morrison et Phil Lynott, sera le musicien irlandais le plus adulé en son pays.

Faut dire que Rory était le plus charmant et le plus simple des hommes. Même en pleine ère glam et glitter, il ne se départira pas de son look de bûcheron pré-grunge, chemises à carreaux, jeans et rouflaquettes. L’homme tronçonne son blues-rock sans prétention, mais avec une intégrité et une gentillesse auxquelles il était impossible de rester insensible.

Les concerts irlandais de 1974 qui font l’objet détaillé du coffret anniversaire de Sony sont sans doute le sommet artistique d’un chanteur et musicien qui ne s’arrêtera jamais vraiment, même pendant la mode punk où il fait déjà figure d’ancien. Il en faut plus pour abattre l’homme qui continue de se produire inlassablement dans le monde. Il a joué avec ses idoles Muddy Waters, Albert King et Jerry Lee Lewis et a vendu au cours de sa carrière plus de 20 millions d’albums, avec 25 tournées américaines à la clé.

Multiples Hommages

Les hommages n’ont pas manqué pour le faire entrer dans l’histoire. À Ballyshannon, sa ville natale, un cinéma porte son nom et un musée lui est dédié. À Cork, une bibliothèque et une place avec un mémorial portent son nom. À Dublin, dans Temple Bar, pas loin de la statue de Phil Lynott, se trouve le Rory Gallagher Corner avec, sous la plaque souvenir, une Fender accrochée. À Ris-Orangis, dans l’Essonne enfin, là où il donna son dernier concert, dans la salle Le Plan, la rue porte son nom.

Mais pour se convaincre définitivement de l’importance et du style Gallagher, il faut se perdre dans les 7 CD (plus un DVD du docu de Tony Palmer sur cette tournée irlandaise de 1974) de ce coffret Irish Tour ’74… On y retrouve 56 morceaux joués live entre le 28 décembre ’73 et le 5 janvier 1974, à Cork, Belfast et Dublin. Le son a été entièrement restauré et du matériel inédit réédité. On y trouve le meilleur de sa virtuosité blues, bien avant qu’il ne s’ouvre dans les années 80 au hard-rock mais aussi aux cuivres et à l’accordéon.

Compositeur chevronné, musicien averti ouvert à différents styles (du folk au flamenco), Rory Gallagher reste pour beaucoup de musiciens un modèle inégalé.


Rory Gallagher, « Irish Tour ’74… » (coffret Sony Music 7 CD + 1 DVD).

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