A 22 ans, la Lausannoise Emilie Zoé se révèle une incontournable bête du pop rock. Première guitariste du chanteur jurassien LiA, elle lessive aujourd’hui les scènes européennes en grattant des gros sons pour la chanteuse bâloise Anna Aaron. Mais surtout, elle chante pour elle, avec ses musicos à elle, pour combler la béance que creusent les émotions brutes, quelque part au niveau des tripes.
Nous ferait-elle le coup du pélican qui s’ouvre le ventre pour nourrir ses petits? On pourra écouter en quartette les chansons de son premier CD avec d’autres créations nouvelles, ce soir au Royal, à Tavannes. A n’en pas douter. En plus, elle partage, avec son pote LiA, le batteur Nicolas Pittet et le bassiste Christophe Farine. Elle a d’ailleurs fourré ce dernier dans les pattes d’Anna. C’est bon pour la colonne…. de son. Son guitariste à elle, Pierre Gilardoni est tout simplement monstrueux. LiA, de son bord, multiplie les expériences et les tournées. Ce soir, il joue en quintette avec, outre les deux charpentiers musicaux imbriqués dans les deux groupes, Bertrand Vorpe à la guitare et Lucas Jeannerat au trombone.
Gilardoni, c’était son prof de guitare quand Emilie avait huit ans. La guitariste avoue son manque d’assiduité à cette époque. Elle aura donc été précoce beaucoup plus tard quand, à 18 ans, elle a porté sa frêle silhouette dûment cuirée sur la scène de Beaulieu, à Lausanne, lors de la cérémonie de sa matu. Sa chanson «Shape» a plu et la scène a mordu la jeune rockeuse.
Plutôt dans le punk
Avec ses copains, elle donnait plutôt dans le punk. Elle est devenue rapidement l’Iron Woman que l’on connaît loin à la ronde et, surtout, dans la chaîne jurassienne même si elle aspire à fréquenter les scènes plus intimistes comme celles du Royal, du Soleil ou du Bikini Test, où elle a verni son CD en première partie de LiA.
Et ce qui devait arriver arriva. «Après avoir joué pendant un an pour lui, j’ai été happée par Anna, au moment où je n’avais pas trop de tune. J’avais envoyé mon CV. Une répète et cela a été ma chance de jouer, de ne faire que ça», se réjouit-elle. Cela aura donc suffi pour prolonger son envie de tourner. Dès lors, ça déménage. Elle a tourné en Suisse, en France, en Belgique, en Allemagne, en Autriche et en République tchèque. Rien que ça. Elle va donc repartir en tournée dès le printemps avec Anna Aaron. Et aussi enregistrer un nouveau CD. «J’ai un réservoir de 15 à 20 chansons. Assez pour en retravailler pour un CD plus consistant», dit-elle.
Mais la chanteuse a gardé un côté punk et puissant qu’elle fait contraster avec la netteté mélodique. «J’aime le son brut de la guitare. J’aime aussi bien me faire souffrir. Je lui casse des cordes et elle m’ouvre des doigts», lâche-t-elle sans aucune émotion dans la voix. Pour cela, il faudra chercher du côté de l’anglais. «C’est ma langue de l’émotion. Si celle-ci est plus forte que la raison, alors j’écris en anglais, c’est plus facile», souligne la chanteuse.
«C’est moi attachée à moi»
Quant aux thèmes de ses chansons, ils évoluent. Son disque intitulé «Empty» dénote bien cette notion de vacuité quasi organique. «J’en avais besoin. J’avais lu une BD où les personnages avaient des gros trous dans la poitrine. C’est en plein ça. J’écris pour remplir le vide. C’est de l’écriture automatique. Je ne raconte pas. C’est plus abstrait. En même temps, tout tourne autour de l’émotion», réfléchit-elle en trouvant soudain la bonne formule: «C’est moi attachée à moi».
Et à sa manière de voir le monde. Avec le surgissement des images, une plongée dans le ciel et des sensations et des étonnements. Tout compte fait, une chanson résume l’attente du public. Elle dit simplement «I need you to feel alive» (J’ai besoin de vous pour me sentir en vie).
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