Splendeurs et misères

Donner d’une main, redonner de l’autre

Par un samedi très, très froid de janvier, je suis allé magasiner des instruments de musique sur la rue Saint-Antoine, chez Jack’s Musique.

À l’intérieur, un monsieur âgé affairé à classer ses choses, nous qui regardons les instruments, et cet homme, au centre du magasin, qui joue de la guitare acoustique. Puisque nous devons toujours catégoriser les gens, appelons-le «l’itinérant». Cet itinérant ne se démarquait pas, en apparence, de tous les autres: un sac qui contenait sa vie, des rides qui marquaient le temps et la misère, et les mains salies et gonflées par l’hiver.

Aucune musique à l’intérieur. Lui seul trônait au centre de la place, jouant de la guitare acoustique, comme s’il avait fait ça toute sa vie. En fermant les yeux, on n’y entendait que du feu et on aurait pu se croire devant n’importe quel Clapton de ce monde, du moins pour un néophyte comme moi.

Puis, le responsable s’est emparé de la guitare, sèchement, laissant l’itinérant les mains vides. On peut comprendre pourquoi. Qui voudrait laisser un itinérant jouer d’une guitare de plusieurs centaines de dollars, d’autant plus qu’il venait de la salir, le manche montrant des traces visibles de ce «délit» ? À ce moment, je croyais que je venais d’assister à un moment crève-coeur. Le pauvre homme, dans le silence, a jeté son dévolu sur une autre guitare, probablement habitué à sa vie itinérante, qui l’oblige à n’avoir que très peu de possessions et habitué à ce que, chaque jour, on lui retire ce qu’il aime.

Contre toute attente, c’était plutôt pour aller accorder la guitare que le responsable lui avait enlevée des mains. Quelques minutes plus tard, l’itinérant a retrouvé sa guitare, et jamais le responsable ne lui a demandé de «ne pas la salir». Il ne l’a même pas nettoyée avant de la lui redonner, probablement par gentillesse. L’opprobre des gens, il le vit déjà régulièrement, pourquoi gâcher son moment de bonheur?

À vous, cher monsieur travaillant chez Jack’s Musique, qui m’avez redonné espoir et confiance en l’humanité.

Sébastien Poirier, Montréal

Soignez-nous!

Le sujet n’est pas nouveau et c’est ce qui le rend si désolant. Nous n’avons pas accès à un médecin au Québec. Je le vis quotidiennement en étant l’heureuse, mais préoccupée, mère de quatre enfants. Je suis les instructions de la centrale de rendez-vous à la lettre dans l’espoir d’obtenir un rendez-vous d’urgence avec notre médecin de famille. Comme l’exige le règlement de la clinique, j’appelle à 12h le mercredi. Pas de rendez-vous possible. Je tente ma chance un autre jour et l’on me répond que je dois appeler le mercredi à 12h, afin d’obtenir un rendez-vous. Je réessaie le mercredi suivant, même chose. Je me fâche d’une façon un peu théâtrale, j’en conviens. On me sert alors les traditionnels «Je vous comprends, madame». Je ne veux pas être comprise, je veux que ma petite fille de 8 ans, absente de l’école depuis une semaine, soit soignée sans que nous soyons obligées d’aller attendre à l’urgence 24 heures, parce que son état n’est pas prioritaire, même si elle tousse depuis deux semaines.

Nous sommes imposés à la moitié de notre salaire, mon conjoint et moi, afin qu’il y ait une plus grande justice sociale. Ce terme inclut certainement l’accès aux soins de santé pour tous.

Bianca Veilleux, enseignante et mère, Saint-Hubert

Prudence élémentaire

Régulièrement, les médias rapportent de malheureux et trop nombreux accidents impliquant des piétons qui, ayant longé une route, ont été heurtés par des voitures. On y apprend une foule de détails: si le conducteur s’est arrêté, s’il avait les facultés affaiblies, l’identité des victimes, leur âge, etc. Cependant, nous ne savons jamais si les victimes marchaient dans la même direction que la circulation ou si elles étaient du bon côté de la route, celle qui permet de voir venir les voitures.

Enfant, ma mère me demandait toujours de marcher du bon côté de la rue. Si je me fie à mes propres observations, beaucoup de gens ne portent pas attention à ce détail. J’en ai eu la démonstration l’automne dernier, alors que je marchais près de chez moi sur une route tortueuse, mal éclairée et où les autos roulent vite. Trois jeunes adolescentes marchaient côte à côte tout en bavardant, l’une d’entre elles sur l’accotement et les deux autres carrément sur la chaussée. Une voiture est arrivée. Heureusement, le conducteur a pu ralentir à temps et les a dépassées en empruntant la voie inverse. Aucune des jeunes filles ne s’est même retournée, continuant à déambuler comme si de rien n’était. Je n’ose imaginer ce qui serait advenu d’elles si le conducteur les avait vues trop tard pour les éviter.

Pierre Lazure, Sainte-Sophie

Impliquons les enfants

Enfant, je visitais régulièrement M. Gérard à la patinoire au bout de la rue. M. Gérard, un retraité qui, cherchant à occuper son temps, était le roi de la cabane des patinoires, où était soigneusement rangé le matériel pour la borne-fontaine, les souffleurs et les pelles à neige.

Avec M. Gérard, c’était frugal. Si on voulait avoir de belles patinoires, nous n’avions qu’à nous impliquer et à nous présenter après l’heure du souper, les jours où il avait neigé, pour les bichonner. Il nous attendait avec ses pelles et il fallait se bouger. La récompense d’un travail engagé était de peut-être conduire une de ses souffleuses.

Lorsque je vois un camion de 500 000$, et au moins cinq cols bleus qui sont requis pour tenir un boyau, je ne peux m’empêcher de penser que c’est inacceptable, compte tenu de tout ce qu’il y a à réparer à Montréal. La Ville se serait-elle engagée, dans ses ententes avec ses cols bleus, à prohiber l’action du communautaire dans des petites choses aussi simples que de faire des patinoires pour nos enfants?

Claude Delage, Westmount

À en perdre son latin

Des publicités nous incitent à rapporter les contenants consignés. Cependant, lorsqu’on veut le faire, les obstacles se multiplient.

Avez-vous déjà lu en toutes lettres «consigné Québec» sur une cannette de thé glacé bien connue? Avez-vous essayé de la rapporter? On vous dira «On ne charge pas la consigne sur ce produit, donc on ne les ramasse pas».

Ailleurs, si vous arrivez avec des bouteilles de bière, on vous dira peut-être «Comme nous ne vendons pas cette marque, nous ne la remboursons pas». Au lendemain d’un party, où vos invités vous ont offert des bouteilles québécoises, achetées je ne sais où, fouillez la ville pour rapporter vos bouteilles. Quand on sait que toutes les bouteilles aboutissent à la même usine de tri et de lavage pour redistribution générale, Recyc-Québec, l’entreprise devrait obliger les marchands à les récupérer ou ouvrir des agences locales où les rapporter, ou offrir un registre sur l’internet des adresses où ces bouteilles sont acceptées.

Par ailleurs, la consigne ne semble pas envisageable pour la SAQ! On devait doubler la consigne sur les cannettes et bouteilles. Est-ce que cela fait toujours partie des projets du nouveau gouvernement?

C’est à en perdre son latin, récupérer!

Gilles Malo

Le mystère du Publisac

Il y a beaucoup de choses dans ce bas monde que je ne comprends pas, et je n’en dresserai pas ici une liste exhaustive. Mais il y a un mystère auquel je suis confronté chaque semaine alors que je reviens du travail et que l’entrée de l’édifice où je demeure est encombrée par une pile de sacs publicitaires, pile qui reste à peu près intouchée jusqu’à ce que le concierge ne la mette au recyclage. Pourquoi m’envoie-t-on un Publisac même si je n’en veux pas?

Pourquoi ce service ne fonctionne-t-il pas par abonnement? Vous en voulez un, vous en faites la demande. C’est simple comme bonjour. Évidemment, on me dira que l’on peut toujours apposer un autocollant sur sa boîte aux lettres pour ne pas le recevoir. Mais de un, encore faut-il avoir une boîte aux lettres à soi. Aussi, pourquoi devrait-on avoir à supplier une entreprise de ne pas nous fournir un service dont nous ne voulons pas?

Qu’attend-on pour obliger les compagnies responsables de ces sacs publicitaires à procéder par abonnement?

Marcel Dugas, communicateur et historien

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